Histoire d'une méprise
Le 28 novembre 1938 (ou le 20 septembre selon certaines sources) est créée, à la radio de Moscou, la Suite pour orchestre de jazz n°2 de Dmitri Chostakovitch. C'est une commande de Victor Knouchevitzki qui dirige le Jazz Band d'Etat d'URSS. C'est également lui qui en assure la création avec son orchestre. Cette suite porte le numéro 2, car Chostakovitch en avait déjà composé une autre, pour orchestre de jazz, en trois mouvements, créée le 24 mars 1934. Durant la guerre, la partition disparaît. Une quarantaine d'années plus tard, une partition est retrouvée, identifiée comme étant celle de cette suite de jazz perdue, et recréée au Barbarican Center à Londres sous la direction de Mstislav Rostropovich, le 1er décembre 1988. Elle est en 8 mouvements : Marche, Valse lyrique, Danse n°1, Danse n°2, Petite polka, Valse n°1, Valse n°2 et Finale. Elle devient rapidement populaire, surtout son septième mouvement, la valse n°2
Il y a bien un léger problème : elle n'a pas grand chose de "jazzy". Les experts expliquent qu'il ne faut pas trop chercher à comprendre, que Chostakovitch n'a pas voulu faire "jazz", mais en a subi les influence… Soit ! L'œuvre est enregistrée, jouée en concert et devient très populaire… lorsqu'en 1999, une autre partition est retrouvée, une réduction pour piano de… la Suite de jazz n°2 ! Et celle-ci est en 3 mouvements (Scherzo, Lullaby, Sérénade), comme la Suite n°1 ! A la demande de la veuve du compositeur, cette réduction est orchestrée par le compositeur Gerard McBurney, un spécialiste de l'œuvre de Chostakovitch, et recréée le 9 septembre 2000 au Royal Albert Hall à Londres par l'Orchestre Symphonique de la BBC sous la direction de Sir Andrew Davis. Quant à celle qui était connue jusque-là sous ce titre de "Suite de jazz n°2", elle est rebaptisée "Suite pour orchestre de variété n°1" (bien qu'il n'existe pas de n°2) et il n'y a désormais plus de raison de justifier son peu de rapport avec le jazz !
La recréation de la "vraie" Suite n°2 aux Proms, le 9 septembre 2000.